Ce n’est un secret pour personne, l’industrie peine à recruter. Le secteur de l’agroalimentaire n’est pas épargné et souffre d’un déficit d’attractivité qui dure depuis plusieurs années, poussant les RH à se réinventer pour capter les talents et surtout, les fidéliser.
L’agroalimentaire français représente 3% des salariés. Avec 500 000 emplois, l’industrie agroalimentaire est le premier employeur industriel de France avec pour objectif de nourrir 9 milliards de personnes dans le monde d’ici 2050. Un défi vertigineux pour les professionnels du secteur de l’agroalimentaire, dont le caractère « essentiel » a été exacerbé par la crise sanitaire. Plutôt épargné durant cette période charnière, la filière a poursuivi son développement sur les deux dernières années et donc augmenté ses besoins de main d’œuvre, besoins difficiles à satisfaire.
La dernière enquête « Besoins en main-d’œuvre » de Pôle emploi, considère le métier d’ouvrier non qualifié de l’industrie agroalimentaire comme le 5e métier en tension au niveau national.
Entre choc des générations, attentes et aspirations divergentes, rapport au travail qui évolue, secteur qui peine à communiquer sur sa réalité, pas facile pour les acteurs du secteur d’attirer et de fidéliser les talents.
Pourtant, les RH du secteur agroalimentaire ont bien compris qu’il fallait agir pour remédier à ces difficultés et investissent massivement dans la marque employeur et dans l’amélioration de la QVCT (qualité de vie et condition de travail).
Pourquoi l’industrie agroalimentaire n’attire pas ?
En réalité, les difficultés de recrutement ne sont pas nouvelles mais elles se sont sans doute accentuées avec la crise sanitaire. Le monde agroalimentaire a subi de profondes mutations:
En amont avec des bouleversements aux niveaux productif et logistique et en aval, avec des changements dans les modes de consommation tendant vers plus de proximité et d’authenticité.
Dans un contexte profondément changeant, l’agroalimentaire souffre encore d’une image peu attrayante pour le commun des mortels. Dans l’imaginaire collectif, l’agroalimentaire, ce sont des métiers pénibles et répétitifs où l’on est exposé au froid, en horaires décalés pour des salaires loin de faire rêver et avec un horizon de carrière bouché.
Souvent critiqué, le secteur de l’agroalimentaire a du mal à répondre à la quête de sens recherchée par des nouvelles générations qui ne définissent plus leur métier comme un marqueur identitaire et social puissant.
Pourtant, travailler dans l’agroalimentaire, ce n’est pas du tout ce que l’on croit.
Cette industrie doit s’adapter en permanence pour répondre aux colossaux défis industriels qui se posent à elle depuis 15 ans : sécurité sanitaire, impact sociétal et environnemental, nouvelles demandes des consommateurs. S’il y a bien un secteur hyper innovant et stratégique en France, c’est bien celui de l’agroalimentaire. On ne parle pas d’un métier mais de dizaines de nouveaux métiers qui se réinventent sans cesse, au rythme des évolutions et des nouveaux défis industriels, règlementaires, environnementaux.
Paradoxalement, l’agroalimentaire souffre d’un déficit d’image par méconnaissance de la réalité du secteur et de ses acteurs : de très belles PME agiles au sein desquelles on valorise les compétences transférables et donc les évolutions internes.
Les RH et la QVCT au secours du recrutement
Pour répondre aux enjeux de manque de main-d’œuvre, les RH innovent, elles aussi, pour capter les talents et surtout les conserver.
Deux objectifs :
- Améliorer les conditions et la qualité de vie au travail pour favoriser l’épanouissement professionnel, le sentiment d’appartenance et transformer les salariés en véritable ambassadeurs de leur métier. Mais également rendre l’organisation du temps de travail en cohérence avec la vie personnelle. Cela passe par l’aménagement des rythmes de production en prenant en compte les effets du 3x8, les heures de nuits ainsi que le travail le week-end. Bref, donner du sens !
- Mieux communiquer en externe sur la réalité d’un monde, plutôt bien perçu par les Français mais profondément méconnu. De nombreux moyens sont enclenchés, tels que la mise en immersion sur des chaînes de production par l’utilisation d’un casque de réalité virtuelle pour de futurs candidats (sur des forums, des salons et via des campagnes Pôle Emploi), ou encore des focus métiers avec la mise en avant de certains profils et de leurs évolutions au sein d’entreprises du secteur.
En matière de QVCT et de sécurité au travail, on peut dire que le secteur a fait des pas de géant depuis quelques années. Nous avons une vision rudimentaire de l’outil industriel agroalimentaire alors que le secteur est véritablement devenu high-tech, innovant sans arrêt et, de ce fait, les postes de travail ont considérablement évolué.
Par ailleurs, une meilleure prise en considération des troubles musculosquelettiques (TMS) et des risques psychosociaux a contribué à proposer des environnements de travail beaucoup plus agréables. On a vu émerger des politiques volontaires et efficientes de sensibilisation, de prévention et de formation. Les RH jouent désormais un rôle clé !
Si l’interne est important, encore faut-il qu’il se reflète et se diffuse en externe et les clichés sont difficiles à casser. Cependant, le secteur et les usines s’ouvrent sur l’extérieur. On voit fleurir les opérations « Portes ouvertes » qui permettent aux candidats de venir « toucher du doigt » la réalité de ce monde industriel, discuter avec des salariés qui trouvent là une occasion de valoriser leur savoir-faire et de transmettre du sens.
Il faudra du temps pour remédier à une situation qui n’est certes pas nouvelle mais qui s’est aggravée sous l’effet d’un contexte particulier et exceptionnel. Le secteur agroalimentaire a de nombreuses cartes en main avec un atout majeur : il nourrit les populations ; il fait donc sens par nature. Il doit se concentrer sur un savant équilibre à trouver entre partage des valeurs et du sens en interne et projection vers l’externe. Une démarche à cheval entre RH, Management, RSE et communication mais s’il y a bien une matière dans laquelle l’agroalimentaire a prouvé qu’il excellait, c’est l’adaptation et la transversalité !
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